Directive Droit d’auteur – Intox & Verités

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VUE D’ENSEMBLE SUR L’ARTICLE 13 – DE QUOI S’AGIT-IL ?

Contexte 

  • Depuis l’adoption de la directive sur le commerce électronique dans l’UE en 2000, la technologie a évolué et les géants du numérique ont gagné de plus en plus de contrôle et d’argent, dans une grande mesure grâce au contenus culturels disponible sur leurs services.
  • Cette augmentation des possibilités de contrôle et la dominance sur les marchés requiert un réajustement et une responsabilisation de la part de ces géants du numérique.
  • Sans paiement, il n’y a pas d’investissement. Les ayants droit ont aussi des droits moraux, en plus de leurs droits économiques, pour décider de la manière dont leurs œuvres peuvent être utilisées et par qui (et font partie du droit fondamental de propriété intellectuelle).

Objectifs

  • Apporter une sécurité juridique pour l’ensemble des parties prenantes.
  • Faire en sorte d’éviter les abus des limitations de responsabilité prévues par la directive E-Commerce. Des géants du net actifs profitent de ces limitations et gagnent de l’argent en utilisant du contenu d’ayants droit sans en avoir l’autorisation.
  • Permettre d’établir un environnement où le réinvestissement dans du contenu est encouragé.
  • Protéger de manière égale les libertés fondamentales des utilisateurs individuels, des ayants droit et des services en ligne.

Point sur les plateformes actives

  • Les amendements de compromis du rapporteur indiquent clairement que l’obligation générale de surveillance est interdite « lorsqu’elle est applicable » (article 13.1.b), étant donné que les limitations de responsabilité de la directive E-Commerce, article 15 inclus, s’appliquent seulement aux services passifs – c’est-à-dire aux services qui n’ont pas d’influence sur le contenu auquel ils donnent accès – et non aux services actifs, qui sont ceux dont fait l’objet le texte du rapporteur.
  • Il est important de souligner que si l’interdiction d’obligation de surveillance générale s’appliquerait aux services actifs, elle ne concernerait pas seulement les infractions au droit d’auteur, mais aussi toute sorte de contenu illégal, dont la pornographie juvénile et le contenu terroriste.
  • La distinction faite entre services actifs et passifs est en cohérence avec les limitations de responsabilité prévues dans la directive E-Commerce et l’interdiction d’obligation de surveillance générale ; elle respecte ainsi les droits fondamentaux et préserve la protection des données.

LES DETAILS DE L’ARTICLE 13 – CE QUE L’ARTICLE 13 NE FAIT PAS

L’article 13 n’enfreint pas les libertés fondamentales prévues dans la Charte des droits fondamentaux de l’UE

  • Dans le cas de l’article 13, le service juridique du Conseil a conclu que la liberté d’expression n’est pas enfreinte car : 1) seulement le contenu identifié par les ayants droit est concerné par les mesures ; et que 2) des mécanismes pour porter plainte sont prévus pour permettre aux utilisateurs qui téléchargent du contenu de contester le fait qu’un contenu soit enlevé.
  • La Charte des droits fondamentaux protège les droits fondamentaux d’expression, de liberté d’entreprise, le droit fondamental de propriété, qui inclut la propriété intellectuelle (article 17.2 de la Charte).
  • La liberté d’entreprise ne protège pas seulement les services du net, mais aussi les entreprises créatives, qui doivent avoir le droit  d’obtenir une rémunération ou de faire retirer le contenu par les entreprises qui profitent de leurs créations alors qu’elles n’en sont pas propriétaires et n’ont pas la permission de les exploiter.
  • Le but n’est certainement pas de limiter la liberté d’expression des utilisateurs et cette liberté ne doit pas être en opposition aux droits des créateurs – économiques et moraux.
  • La Cour de justice de l’UE a toujours jugé en ce sens que l’ensemble des libertés et droits fondamentaux doivent être équilibrés entre eux, et qu’aucun d’eux ne prend précédence sur l’autre.
  • En réalité, le nombre de contenus enlevés de manière erronée est extrêmement bas : il s’agit de 0,0002% dans le cas des contenus audiovisuels et de 0,04% dans le cas de la musique.

L’article 13 n’enfreint pas la protection des données personnelles

  • L’article 13 concerne exclusivement les téléchargements au sens de « upload » (et non les téléchargement au sens de « download », ou le streaming) du contenu protégé par le droit d’auteur identifié au moment de l’upload (sur la base, par exemple, de l’empreinte digitale du contenu et qui est donnée par les ayants droit).
  • Les mesures prévues n’entraînent certainement pas le traitement des données de tous les utilisateurs ou encore l’analyse systématique de leurs profils.
  • Il n’y a absolument pas d’exigence de vérifier d’autres données liées à l’upload du contenu, comme l’identité ou l’adresse IP des « uploaders » individuels, ou même la date, l’heure ou la localisation.

L’article 13 n’est pas en contradiction avec les limitations de responsabilité prévues par la directive E-Commerce ni l’interdiction de l’obligation de surveillance générale

  • Il n’y a pas de hiérarchie entre les actes de droit secondaire. Comme cela est indiqué par le service juridique du Conseil, l’usage de qualifications telles que « pas en adéquation avec », « incompatible » ou même « enfreint » en lien avec la directive E-Commerce n’est pas, au sens juridique, correct. En effet, la règle de l’acte le plus récent prend le pas sur la règle d’un acte existant qui régule le sujet en question d’une manière générale.
  • Les clauses d’exonération (« safe harbour ») sont pertinentes seulement pour les plateformes passives. L’interdiction portant sur l’obligation générale de surveillance ne s’applique pas aux services actifs, qui exécutent un acte relevant du droit d’auteur et qui, par conséquent, devrait soit conclure une licence avec les ayants droit, soit retirer le contenu. Une telle licence ou autre accord peut prévoir des mesures de filtrage, comme cela est permis dans la directive E-Commerce. L’interdiction s’applique seulement aux cas de plateformes purement passives.
  • La Cour de justice a récemment jugé dans plusieurs affaires, dont Stichting Brein vs Ziggo (C-610/15, paragraphe 38) que lorsqu’un service fournit un moteur de recherche, indexe et catégorise le contenu, il ne peut pas être considéré comme relevant d’une activité ayant un caractère purement technique, automatique et passif, c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’une plateforme passive (cf. considérant 42 de la directive E-Commerce).
  • Dans le cas des services passifs, les mesures techniques qui sont mentionnées dans le projet de directive ne relèvent pas d’une obligation générale de surveillance (cf. aussi l’avis du service juridique du Conseil) car :
    • Les mesures ne sont pas coûteuses (des mesures sont déjà utilisées en pratique et elles sont variées dans leur nature et leurs coûts pour correspondre de manière adéquate à la taille et au type de plateformes, grandes et moins grandes) ;
    • Les services en ligne n’auront pas à déterminer eux-mêmes si un contenu spécifique est « uploadé » en infraction du droit d’auteur, mais seulement à identifier le contenu protégé au moment de l’upload sur la base des données d’identification qui auront été fournies par les ayants droit ; et,
    • Comme les ayants droit auront à produire eux-mêmes les données nécessaires, ils participeront au coût des mesures prises par les services en ligne, et cela réduira aussi la logistique de ces mécanismes pour les services en ligne.
  • Les cas de la Cour où les mesures de filtrage ont été rejetées (C-70/10 Scarlet Extended, C-360/10 Netlog v. Sabam) ont concerné respectivement un fournisseur d’accès à Internet et une plateforme de réseau social, mais en aucun cas un service de partage de contenu en ligne, dont le but principal est exactement de fournir un accès à du contenu.